Le grand mystère des reliques, enfin dévoilé...
Les reliques sont souvent des objets d'apparence assez banale : un morceau d'os, un tissu ou un objet. Ces pièces revêtent pourtant une importance colossale dans le christianisme, puisqu’elles proviennent toujours d'un personnage vénéré. Enfermés dans de précieux coffrets, ces fragments sont autant de témoignages d'une histoire plurimillénaire, souvent tourmentée.
Les premiers chrétiens ont en effet été persécutés par les autorités romaines qui rejetaient ce nouveau culte monothéiste. Les suppliciés sont alors devenus des martyrs dont les corps furent souvent considérés comme des vecteurs de miracles. La conservation des restes mortels de ces « héros de la foi » a permis la consolidation d'une religion en pleine lutte pour sa survie.
Avec la fin des persécutions et la raréfaction des martyrs, les personnages exemplaires du christianisme ont pu à leur tour endosser le statut de saint. Ils ont été érigés en véritables modèles pour les croyants. Porteuses d'une puissance spirituelle, leurs reliques sont alors apparues comme un support idéal pour la prière, une source de miracles qui permet de propager la parole d'une organisation en plein essor.
La Nouvelle-France n'a pas échappé à ce phénomène.
La Nouvelle-France n'a pas échappé à ce phénomène. Dès les premiers temps de la colonie, ces objets si particuliers ont quitté le Vieux Continent dans les bagages des religieux chargés de l'implantation de l'Église, comme le démontre Dominique Deslandres dans le premier article.
Dans ce numéro de Cap-aux-Diamants, l'étude des reliques ne concerne pas la question de leur authenticité ni de leur supposé pouvoir surnaturel. Le travail de nos auteurs revisite plutôt l'histoire de ces objets en analysant leur parcours et leur usage sur notre territoire. Ainsi, le second article, rédigé par mes soins, compare la portée de deux copies de reliques prestigieuses, soulevant des questions sociales et politiques.
Stéphan Martel décrypte ensuite les enjeux liés à la conservation du corps d'une future sainte locale : Marguerite Bourgeoys. De simple importateur de matériel sacré, la Nouvelle-France, puis le Québec vont ainsi devenir de véritables fournisseurs de saints et de leurs reliques associées. C'est ce que démontre notamment Fannie Dionne dans son article De vénérées à collectionnées : les reliques des saints martyrs canadiens.
Cette nouvelle donne n'empêchera pas certains ecclésiastiques d'aller chercher des reliques en Europe au XIXe siècle pour les ramener de l’autre côté-ci de l'Atlantique, comme Michel Dahan l'explique dans son étude. Ce culte des reliques va se perpétuer au XXe siècle, notamment à travers certaines congrégations, comme celle des Sœurs adoratrices du Précieux- Sang, décrite par Johanne Biron.
Ce culte catholique concerne également des personnages parfois en marge de la religion. C'est ainsi que la dépouille de Louis-Joseph de Montcalm connaîtra une destinée tumultueuse avec des enjeux dépassant l'aspect de la foi, comme le souligne Dave Noël.
D'ailleurs, Dominique Deslandres le démontre dans son article, le culte des reliques s’est aujourd’hui transféré dans d'autres domaines : « C’est donc aussi un héritage sacré, dont le culte, aujourd'hui, pourrait bien s'apparenter à celui que vouent les fans aux moindres objets, lieux et traces de leurs idoles – pensons aux TT-sShirts des chanteurs qu'on s'arrache lors des concerts, pensons aux pèlerinages qu'on fait aux tombes des stars… »
Sylvain Lumbroso